Le traitement des questions scientifiques est aujourd’hui un enjeu majeur pour les acteurs du contentieux interétatique : au-delà de son coût – en temps et bien sûr en argent – il s’avère souvent décisif lorsqu’il s’agit pour les États de défendre leurs intérêts et pour le juge international de promouvoir la légitimité et la pérennité de son institution. Parce qu’elle recèle depuis les Lumières une prétention à l’absolu, la science est en effet généralement considérée comme un gage d’objectivité, de qualité, un instrument capable d’atteindre au vrai qui s’avère d’autant plus précieux pour les acteurs du contentieux interétatique que l’ordre juridique international est par nature décentralisé.
Pour déstabilisante qu’elle puisse être au regard de l’enjeu particulier du maintien de la paix, cette constatation ne doit néanmoins pas conduire à dénier à la science sa place et sa pertinence dans le cadre du règlement des différends interétatiques. La présente étude montrera que, dépouillée de toute prétention particulière à la vérité et/ou à une parfaite objectivité, l’expertise est susceptible de s’illustrer comme une institution parfaitement fonctionnelle dans le cadre du règlement juridictionnel des différends entre États.